Lucien Goldmann : La réalisation d’une cohérence

Encore faut-il ajouter que si, sur le plan individuel, les instincts refoulés subsistent dans l’inconscient et tendent vers une satisfaction symbolique qui est toujours possession de l’objet, les tendances collectives souvent implicites mais non inconscientes visent non pas une possession mais la réalisation d’une cohérence.

La création culturelle compense ainsi le mélange et les compromis que la réalité impose aux sujets et facilite leur insertion dans le monde réel, ce qui est peut-être le fondement psychologique de la catharsis.

Une hypothèse de ce genre, qui intégrerait sans difficulté ce qu’il y a de valable dans les analyses freudiennes et dans les études marxistes de l’art et de la création culturelle, pourrait rendre compte à la fois de la parenté — si souvent pressentie par de nombreux théoriciens — et de la différence de nature qui n’en subsiste pas moins, entre d’une part le jeu, le rêve et même certaines formes d’imagination morbide et, d’autre part, les grandes créations littéraires, artistiques et même philosophiques.

L.Goldmann, "Pour une sociologie du roman", Paris 1964., s.230.

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