Marta Cywińska & Stefan Dziekoński o Modiglianim
2023-01-01Szymon Kozieja: Directions of work towards culture
2023-01-03Balzac ou la recherche de l'absolu et de la destruction
Selon Balzac l’art est créé par les pensées, des idées. Les idées et les pensées ont le pouvoir de se métamorphoser en formes, couleurs, sons, tout ce qui est matériel. Le rôle de l’artiste est de matérialiser les pensées en œuvre mais l’artiste ne peut pas combattre la nature. Frenhofer et Gambara sont les deux artistes qui sont les victimes de leur pensées. Balzac souligne la vanité de l’artiste qui se met en même position que Dieu. Frenhofer a l’espoir de donner la vie à son ancienne maîtresse - Catherine Lescaut. Gambara croit saisir la musique céleste. Ils n’ont pas eu le pouvoir de satisfaire leurs exigences esthétiques. On peut comparer ses deux artistes à des Prométhéens qui veulent voler la force de la nature, pour « apprivoiser » ses forces.Ils sont passionnés par l’infini, et l’abstraction. Souvent ses attentes de saisir l'introuvable idéal les amènent vers la mort, la folie ou le suicide. Ils ne savent pas qu’il y a des limites de l’art et de la pensée.
Dans le chaos des lignes et des couleurs
Les artistes sont dévorés par leur passion pour l’art. L’art est un instrument de la destruction à cause de la pensée et du désir. Pour Balzac tout activité créatrice des artistes est menacée de destruction. Quand les pensées, qui sont le moyen de création, ne sont pas contrôlées tout l’effort de création artistique peut se détruire.
On ne peut pas savoir si l’échec de Frenhofer était le résultat de sa création trop novatrice pour son époque ou bien de sa quête pour trouver l’idéal. La confrontation avec ses sentiments est sa volonté, toutes les émotions se battent en lui, la fierté et la défaite. Sa crédulité se bat avec la méfiance de son public. Il se sent humilié en face de ses élèves qui ne sont pas capables de voir autre chose que le chaos des lignes. Il pense d’abord que les peintres se moquent de lui mais il se trompe. Il veut croire en son idéal, et en la quête de l’absolu. C’est enfin l’art qui lui révéle la réalité, cruelle, qui est visible sur le tableau. Son rêve de l’absolu lui donne enfin la mort, la destruction de ses tableaux. L’échec de Frenhofer est dans sa quête pour combattre la nature : « Oh ! nature ! nature ! qui jamais t'a surprise dans tes fuites !» [1]
Frenhofer veut trouver une beauté absolue- la femme qui est incomparable avec les autres. Il veut saisir cette beauté dans son tableau. Il veut encore plus, il a l’ambition d’être comme Dieu, donner la vie à sa femme. Ces aspirations le mène vers la catastrophe. Il va perdre sa femme, son tableau et enfin sa vie. Ces tentations pour trouver l’idéal sont très dangereuses. Comme artiste Frenhofer cherche l’Absolu dans sa création, une beauté idéale qui peut être comparée à une déesse- Venus. Frenhofer est concentré sur chaque détail qui est pour lui le fragment de la beauté. Ces détails de l’idéal ne lui permettent pas de voir la totalité de sa création. Le seul fragment visible dans son tableau, le pied, se perd dans le chaos de la totalité. « Le pied délicieux » est comme l'éclat de la beauté dans la totalité de son œuvre. C’est n’est pas suffisant de créer le pied idéal pour saisir la beauté totale. Même si le pied qui a été découvert par Porbus et Poussin est magnifique, elle n’est pas comparable à la beauté de Venus. Dans le chaos des lignes et des couleurs, émerge seulement ce « pied vivant »- la seule trace d’existence d’une femme idéale. Le « pied délicieux » de Catherine Lescault est un organe de fétiche, très féminin. Le pied est séduisant, c’est une représentation d’une femme idéale.
<<Le pied délicieux>> - la recherche de beauté féminine
Catherine Lescault est devenue pour Frenhofer une oeuvre parfaite, une femme idéale. Malheureusement la femme idéale n’existe pas et c’est une double perte pour Frenhofer. Le chef d’œuvre inconnu est comme le tombeau de Catherine Lescault. Son pied est la seule chose qui reste de tout son corps. Il ne reste presque rien de sa beauté, juste l’éclat d'un détail, son pied. Les deux peintres qui sont devant le tableau de Catherine Lescault sont pétrifiés. Ils sont en stupeur devant l’absence du personnage. C’est la seule chose qui reste de la ruine- « muraille de peinture ». Le pied dans Le Chef d’œuvre Inconnu est comme une icone de la peinture réelle. Le pied est aussi le symbole de quelque chose impossible à réaliser. C’est le morceau de la figure qui ne peut pas être réalisé.
Le « pied délicieux » du Chef d’œuvre Inconnu est comme une icône de la peinture réelle. Ce qui intéresse le plus Frenhofer est la recherche de la beauté imaginaire. Enfin il a aperçu qu’il n’y a rien sur sa toile. Son travail de dix ans peut être comparé à un travail de deuil. Son travail est partagé entre un fétiche (le détail, le pied) et la mélancolie du chaos de couleurs. Entre le détail et le deuil, il y a un corps absent. On peut dire que ce tableau est une relique de Catherine Lescault. Le tableau montre le corps qui a déjà disparu. Le corps de Catherine est de tout façon incomparable et la découverte du pied est la preuve de sa beauté.
L’artiste à la recherche des limites de l’art
Frenhofer dans son art recherche une femme idéale. Il veut créer « La femme incomparable ». Pour lui la femme est un objet de désir et en même temps le chef d’œuvre. Frenhofer dans son attitude de créer une image de beauté idéale cherche en même temps les limites de l’art et de la création humaine. Dans ses tentations de saisir les traits de la beauté idéale, de créer la femme irréprochable, il s’éloigne de plus en plus de son idéal. Pour lui la femme irréprochable est devenue la femme inapprochable. Elle est introuvable dans ses recherches et attitudes, il ne peut pas la dépeindre par les couleurs. Elle est inapprochable pour lui parce qu’elle n’existe que dans son imagination. Frenhofer la désigne comme « l’introuvable Venus des anciens » . Par cette façon de la désigne il présssent déjà son existence introuvable. Elle ne peut pas exister même dans son tableau. Elle est seulement dépeinte comme un fragment de pied qui est juste un éclat de beauté. Elle disparait sous « la muraille de peinture ». Elle se dissipe dans un chaos de lignes et de couleurs.
Nous savons qu’il va tout perdre- le tableau, la femme et sa vie. Frenhofer se perd dans la poursuite de cette femme. Il désire sa « femme incomparable ». Il n’est pas capable de faire la différence entre la femme et le tableau. Il considère le portrait de la Belle Noisseuse comme son épouse. Il est jaloux de la montrer au public.
L’excès et l'esprit artistique
Gambara se passionne à tel point pour la musique qu’il essaye comme Frenhofer d’aller plus loin dans sa création. Il essaye de modifier les instruments musicaux pour obtenir des sons idéaux mais à la fin la musique qu’il crée est insupportable. Il est considéré comme un fou par Giardini. Son piano partition est considéré comme une cacophonie de sons, sans logique pour son audience. Il n’y a pas de correspondance entre sa musique et l’idéal musical de son époque. Par contre, quand il se débarrasse de ses pensées dans l’état d’ébriété, Gambara relève son génie musical. Marcosini a découvert que l’état d’ivresse libère l’esprit artistique de Gambara. Ainsi il a découvert que l’excès de réflexion, l’intellectualisation détruisent son œuvre.
Avec l’excès de pensées sa musique est trop stérile et incompréhensible pour les autres. L’ivresse libère son esprit de création. Il prouve son génie par son interprétation de l’opéra de Meyerbeer, Robert, le diable. L’alcool qui au debout était la solution pour la folie de ses pensées, la surintelectualisation est devenu le désastre pour lui. Il commence d’abuser de l'alcool, perd sa femme et tombe en ruine. Il est obligé de survivre dans la rue, de jouer de la musique pour les gens „ordinaires”.
Deux génies condamnés à l’échec
Gambara et Frenhofer sont deux génies condamnés à l’échec à cause de leur ambition et l’abandon total aux créations artistiques. Ils sont trop doués, trop ambitieux dans leurs recherches. Gambara veut saisir la musique céleste et se plonge dans ses réflexions sur la musique et la métaphysique. Pareil, Frenhofer veut dans ses recherches sur la peinture transcrire les lois qui déterminent des formes, des couleurs, des volumes. Tous les deux sont dans le monde de leurs pensées, des idées. Ils sont prêts d’abandonner tout pour plonger dans leur monde d’inspiration. De plus, dans ses moments d’oubli, ils sont comme possédés par les forces surnaturelles. Poussin voit un être démoniaque dans Frenhofer.
Ces deux artistes cherchent à découvrir les lois divines de l’art et de la nature. Frenhofer dans ses recherches métaphysiques veut „forcer l’arcane de la nature.”[3] Il veut franchir la frontière des possibilités humaines. Malgré ses efforts, son art, selon Poussin : „va se perdre dans cieux”. [4] Dans ses tentatives il dépasse le domaine de l’art plastique comme simple imitation de la nature. Ses recherches sur la création céleste sont condamnées à l’échec parce qu'il est impossible d’incarner ses idées en œuvre matérielle.
Bogumiła Gutkowska
Fot.Pixabay
[1] H. de Balzac, Chef- d’œuvre Inconnu, Gallimard, 1994, p. 35
[2] Ibid., p. 35
[3] Ibid., p. 35
[4] G. Didi-Huberman, La Peinture incarnée suivi de Le Chef-d’œuvre inconnu, d’Honoré de Balzac, 1985